Rencontre avec les cocaleros

Publié le par ben et sam

Rencontre avec les cocaleros.

 

 

 

  Depuis quelques temps que nous parcourons le monde andin, nous sommes surpris et curieux de voir l'importance de la feuille de coca et prenons conscience que son importance dépasse la simple utilisation que l'on peut en faire. Cette petite plante est le symbole sacré des cultures andines et apparait dans toutes les facettes de la vie des gens d'ici. En arrivant en Bolivie, une nouvelle idée a donc germer en nous: Pourquoi ne pas faire un petit film documentaire (avec nos moyens bien sûr) sur les cocaleros (cultivateurs de coca), retracer l'histoire de la coca et donner la parole aux gens d'ici, sociologues, paysans, commercants, syndicats..qui vivent de la coca ou proche de celle-ci. Ainsi celà permettra t'il au monde occidental de connaître cette richesse qu'ont ces pays et que la coca n'a rien à voir avec la cocaïne ou même le Coca-cola.

Nous voila donc partis à la rencontre d'une sociologue,Mme Zdenka Silva, conservatrice et fondatrice du musée de la coca de La Paz. Nous commencons par la visite de ce petit musée tout à fait bien agencé:

Il y est retracé l'histoire de la coca depuis 500 ans,

 le passé, present sacré de la plante,

la guerre de la coca,

la cocaine et les produits de synthèse,

les boissons,

et les études scientifique menées par des université comme Harvard sur les qualites nutritives de la feuille de coca et les possibilités ouvertes par ces découvertes.

Nous revenons à l'heure de la fermeture pour nous entretenir avec Mme Zdenka Silva. Nous avons préparé quelques questions à poser, nous voyons rapidement l'énergie que cette femme donne à la défense de la coca. Ainsi nous repartons avec bien plus de réponses que nous n'avions de questions; la coca est de plus en plus au centre des discutions populaires et politiques. Elle a été longtemps le symbole des luttes sociales du pays et elle reflète toujours le problème de la main mise des Etats Unis sur un produit, sur une richesse qui ne leur appartient pas (la colonisation continue diront certains).. 

   Quelques jours plus tard nous partons pour la région du Yungas, au nord est de La Paz avec dans l'idée de rencontrer des producteurs. après 4h de bus et 4h de marche, nous arrivons au village de Arapata. Nous décidons de nous arrêter pour manger et commencons à parler de notre projet. Le garcon qui nous sert, tout content de nous parler nous dit qu'il est possible de rencontrer son père qui pourra sûrement nous aider (quelle coincidence !!).

Nous revenons donc en fin de journée après nous être installés dans un petit hospedaje, pour rencontrer le père de Peter; Pedro Mamani Loza. Celui-ci enchanté de nous recevoir nous dit que pour connaitre la coca il nous faudrait rester au moins  1 ans ici, nous lui expliquons que nous n'avons que quelques jours et que nous ferons ce qu'il est possible de faire.

 

 

 

 

 

 

Il nous invite à venir au champs avec sa famille dès le lendemain et nous dit que nous devions aussi rencontrer le syndicat , car '' la coca est l'affaire de tous et tous ensemble ''. Nous sentons tout de suite que Pedro fera son maximum pour nous aider à découvrir et donc à faire découvrir cette plante célèbre mais pourtant quasi inconnue (ou confondue)chez nous.

Mardi: Il est grosso modo 6H30 du matin. Nous nous levons et allons en direction de la maison de Pedro et de sa famille pour passer la journée au champs pour mieux comprendre à quoi peut ressembler la vie d'un cocalero. En arrivant devant chez lui, il nous fait comprendre qu'il n'est pas encore prêt et qu'il fallait revenir d'ici une bonne heure ( comme d'habitude la ponctualité n'existe pas vraiment dans ces pays, ou bien est-ce nous qui ne savons pas prendre notre temps..). Quoiqu'il en soit nous revenons une heure plus tard et attendons encore bien une demie heure avant de partir. Pendant ce temps là, l'épouse de Pedro nous prépare le repas de midi ( foi orange fluo avec riz et patates). Elle met le tout au fond d'un sac plastique (appétissant non ?).

Ça y est nous partons accompagnés de Pedro et trois de ces enfants (Gaby, Peter, David). Ici les enfants n'ont pas le choix, ils doivent travailler pour aider la famille et ainsi peut être pouvoir continuer ces études. En descendant la vallée nous constatons que la poubelle ici n'existe pas (encore moins le recyclage). Ces gens vivent de la Terre et la respectent énormément seulement la plupart d'entre eux ne savent pas que des matières comme le plastique sont mauvaises pour la terre et de surcroit pour la feuille de coca..

Nous mettons une bonne demie heure pour rejoindre les champs. Là-bas nous nous asseyons quelques temps afin de consommer la feuille avant de commencer le travail. Quasi tous les paysans (les miniers aussi) mâchent la coca pour travailler car elle repousse la fatigue (nous en savons quelque chose) car elle est extrèmement riche en vitamines en protéines et en minéraux. De plus elle a l'avantage de diminuer la sensation de faim et de soif.

 

 

 

                                              Nous profitons de ce moment pour échanger avec Pedro. Il nous parle de son métier, de sa famille (6 enfants), des difficultées qu'ils ont pour vivre, de la coca bien sur et de son rôle central dans la vie familiale et communautaire.

En plus de couvrir toutes les dépenses (santé, vêtements, école..) cette petite feuille accompagne une personne dans chaques moments importants de sa vie.. Lors des fêtes il est coûtume de s'échanger des feuilles et de les consommer ensemble.. La coca est même présente aux enterrements et tient un rôle majeur dans le deuil à une personne. A la naissance la hoja (feuille) célèbre la venue du nouveau né. Elle sert aussi à la demande en mariage : si le père de la promise accepte les feuilles du jeune époux c'est que le mariage peut se faire.

En milieu de matinée nous commençons la récolte des feuilles. Tout de suite l'on voit les professionnels. La vitesse à laquelle Pedro et sa famille récolte est impressionnante. Nous autres peinons car la position courbée est plus qu' inconfortable celà nous rappelle un peu les vendanges). De plus les feuilles se cueillent une par une en prennant soin de ne pas tout arracher.

Pour Peter les moments de récolte sont très importants et doivent être fait dans l'échange et la bonne humeur.  C'est pourquoi durant toute la journée nous sommes bombardés de questions sur la France et notre vie là-bas. La plupart des questions étant focalisées sur l'argent. Le niveau et le cout de la vie en France est effectivement beaucoup plus élevé qu'ici ( avec 1 euros tu peux manger 2 fois au restos). On apprend que le salaire moyen d'un bolivien est de 440 euros mais que la majorité des gens (60%), en général les indigènes, vivaient avec moins de 1 euro par jour. Ils furent également très étonnés de savoir qu'en France la plupart des gens n'avait pas de religion et ne croyait plus en Dieu ou même qu'à l'école les enfants ne chantaient plus l'hymne français, voir ne le connaissaient pas.

La journée se termina vers 5h30..Seulement il faut encore remonter au village (1 heure d'ascension). Nous avons finit bien fatigué ainsi que dévoré par les moustiques contant de goûter du sang tout frais venu d'Europe.

Cette journée fut très riche, elle nous a permis de mieux connaitre les gens d'ici.. toutes ces différences nous ont renvoyé directement à notre culture, à nos habitudes, à nos fonctionnements et tout ce qu'il y a de bon ou de moins bon dans nos modes de vie.

 

 Mercredi, nous avons rendez vous à 8h chez Don Pedro Huanca (un autre cocalero) pour le séchage des feuilles cueillis la veille. Le soleil ne voulant pas se montrer, nous attendons les 11h. Pour sécher la feuille de coca, il est nécessaire 3h de plein soleil. Pedro nous explique que si le temps est couvert, la feuille noircit et perd moitié de sa valeur. C'est donc le moment crucial pour une famille: si le séchage se fait bien et que la coca se vend un bon prix, la famille fait alors la fête.

 

 

 

 La coca sèche dans le "cachi", mot d'origine Aymara. C'est une sorte de piscine d'ardoisebleu foncé de 50m2 où la recolte est étalée le plus largement possible pour un séchage rapide avec le soleil, l'ardoise chauffe très fort et la coca peut sécher en quelques heures. Le travail de la pierre est très délicat, il s'agit de tailler de fines plaques d'ardoise, et d'aller les chercher  à dos d'homme dans la carrière d'un canyon où Pedro nous dit qu'il est difficile d'aller; le chemin étant très peu large et à flanc de falaise.

Pedro nous explique également comment se travaille la terre, avec quels outils. Mais ce qui lui tiens le plus à coeur c'est le message: nous ne sommes pas des narcotraficants (fabricant de drogue), la coca n'est pas de la cocaine, ni de la drogue. ''Nous autres paysans ne savont même pas ce qu'est cette drogue et comment elle se fabrique'' nous dira t'il.

 Nous revenons 2 h plus tard pour ramasser la coca, la mettre dans des sacs qui partirons pour La Paz le lendemain. Sur le chemin, nous rencontrons 3 enfantsqui jouent à se pisser dessus...Ils nous accompagnent un moment en nous tirant la barbe tout le temps...

En arrivant à la maison de Pedro, nous rencontrons sa femme qui retourne les feuilles dans le cachi, elle nous dit qu'il manque encor 2h car le temps n'est pas des plus favorables. L'odeur qui se dégage du cachi est bien forte et typique. nous attendons donc, mangeant des oranges que le séchage se termine et nous repartons pour notre "hospedaje".

A l'heure du souper nous retrouvons ''les Pedro'' au restaurant et après un bon repas partons pour le bureau du syndicat des cocaleros de la communidad de Santa Rosa de Lima dont fait parti le village de Arapata. La-bas nous rencontrons le vice president et le president de "ADEPCOCA".

Tous les producteurs de coca doivent passer par ce bureau pour pouvoir vendre leur coca à La Paz en toute légalité. Ils y remplissent des documents qui serviront de traçabilité, comme on dit chez nous (les producteurs ne veulent pas être considérés comme narcotraficants et dénoncent même ceux-ci).  Adepcoca est une organisation tant communale que départementale et nationale qui existe grace aux producteurs qui désirent plus que tout que leur travail soit valorisé et que la coca soit dépénaliser (ne soit plus sur la liste des drogues des nations unies). Beaucoup d'efforts, de revendications locales pour un travail indispensable et sacré. En effet la vente de la feuille de coca permet à toutes les familles de la région du Yungas de vivre car aucune autre plante ne pousse dans cette région.

 

 

 

 

Le lendemain à l'aube, nous retournons au champs de Pedro Mamani où avec ses enfants, il nous montre comment se travail la terre et quelles étapes sont nécessaires avant même de planter. Il nous explique que se travail se fait normalement en janvier, juste après la saison des pluies pour que les jeunes pousses prennent racine rapidement.

 

 

 

 

 

                                            Nous sommes à flanc de montagnes, et comme partout lorsque l'on travaille la terre, il y a des problèmes d'érosion (la terre se fait emporter par l'eau quand il pleut). il est donc nécessaire de modeler le sol avec "una paleta", planche de bois dure qui sert a aplatir la terre, et de laisser des arbres dans les champs.

Ces "escaliers" durent entre 5 et 10 ans et sont préparés avec soin puisqu'ils retiennent l'eau, le sol et qu'ils protègent la coca. Pedro nous dit qu'ils n'utilisent pas de produits chimiques dans la commune car ils rendent la terre sabloneuse et les problèmes d'érosion empirent, ils sont des producteurs écologiques. A la fin de la matinée Pedro nous montre comment se fabrique la "lejia", cette pâte noire qu'ils machent avec la coca. Ce sont des cendres de bananiers, quinoa (céréale), tchahé-tchahé (arbre)...Par exemple il coupe quelque branches vertes de tchahé-tchahé et y met le feu à l'ombre. Le bois dois se consumer plus que brûler pour que la "lejia" ne soit pas trop forte ni ne brûle la bouche. Une fois le tout transformé en cendres, il ramasse celle-ci, y ajoute un peu de sucre, fait une boule..et voila! c'est prêt. La "lejia" sert de catalyseur, et aide la salive à extraire les nutriments de la feuille de coca.

 

 

 

Avant de s'en aller d'Arapata, nous  demandons à Pedro s'il y a un "Yatiri" au village et s'il est possible de le rencontrer. Le  "Yatiri", est un guerisseur, un homme, une femme qui connait les secrets de la coca, soigne et éloigne les "mauvais esprits". Pedro nous dit qu'il y a bien un Yatiri au village, il nous donne rendez-vous au syndicat à 8h. Après une bonne soupe, nous nous retrouvons au syndicat où Pedro Huanca nous parle de cet autre visage de la coca, son côté spirituel, sacré depuis des générations et des génerations d'andins. Nous apprenons qu'il ne veut pas se déplacer, nous partons donc chez lui accompané de nos amis Pedro.

L'homme que nous rencontrons est petit, courbé, le visage marqué par le soleil, pieds nus et vêtu simplement...il dégage déja quelque chose de mysterieux...Ses grands yeux profonds semblent perdus dans le vide comme s'il y voyait ce que nous ne pouvons percevoir.Nos amis lui expliquent le pourquoi de notre venue en Aymara et préparent un paquet de feuilles parfaites, sans défauts. La pièce où nous nous trouvons est remplie de flacons, bouteilles, et babioles en tout genre. Une seule ampoule, jaune, procure à l'endroit une atmosphère mystique particulière.

Nous nous asseyons par terre, le Yatiri place précautionneusement quelques feuilles sur un draps et commence à en faire tomber d'autre en parlant en Aymara. Suivant comment et où elles tombent, c'est un bon signe ou une mauvaise augure. Pedro nous traduit ce qu'il dit. Le chaman répète 3x la divination : tout devrait bien se passer pendant ce voyage (peut être allons nous être malade, mais sans gravité)..

Après ceci, il se propose de préparer une offrande à la Pachamama (terre mère). L'offrande se compose de sucreries en tout genre qui ont chacune un rôle de protection, de chance, ..de feuilles de coca, de coton et d'alcool. Pendant la préparation il parle aux esprits et entre les mots Aymara nous comprenons quelques "noestro padre","espiritus santi", ou "santa maria". Ici, comme à Cusco, la tradition et le catolicisme se sont entremelés voir complétés. Le Yatiri ira brûler le paquet un jour particulier où la terre est capable de recevoir ses offrandes afin de nous protéger. Cette offrande montre bien l'importance de la terre pour ces gens là. Tout est une histoire de réciprocité nous dira t'on. Pour les peuples andins donner et recevoir font partis de l'équilibre que nous autres humains devont entretenir. Les hommes reçoivent de la Terre nourriture et savoir, il faut alors la remercier et la respecter pour que cet échange soit ''équitable''. Nous nous serrons la main pour clore la "cérémonie" et nous partons pour notre hospedaje la tête pleine de nouvelles informations et l'esprit clair. Cet homme à véritablement quelque chose de spécial..auquel nous n'avons pas accès..

Vendredi nous saluons nos amis et repartons pour La Paz comme les nouveaux embassadeurs des cocaleros de Arapata. Cette courte visite auprès de ces gens-là fût extraordinaire et riche en informations et surtout en relations humaines. Nous avons été accueillis les bras ouverts et avons compris tout de suite l'importance pour ces gens là (les autres aussi) que l'on diffuse leur message afin que dans l'imaginaire des gens il existe une différence entre les feuilles de coca et la cocaïne ou même coca cola. Ces derniers sont les symboles de l'individualisme, de la maladie et de la nouvelle colonisation des pays occidentaux alors que la hoja de coca représente à la fois la tradition, la médecine et le développement.

 

 

Publié dans projet

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P
salut a tous et un petit bonjours de christophe pour sam plus je regarde votre blog plus je memerveille de decouvrir cette terre qui nous est tous inconnue et toute la sagesse de ces personnes que vous cotoyees chaques jours que dieu fait  continue votre belle aventure et faite nous vivre encore des moments passionnants le monde n est pas que misere et il merite des personnes comme vous pour le faire comprendre a plus les gars et bonne route
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P
bonjours a tous merci pour ces belle s photos et tout ces commentaire au fait sam cofreco va bien a plus et bonne continuation
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G
Bravo les gars !!!!!!<br /> Rien à dire, ce récit est tout bonnement passionnant !!<br /> Merci à vous de nous faire voyager un peu en partageant votre voyage !!<br /> Guigui
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